Vendredi 22 février, il est 6h je sors du dortoir pour aller
prendre le quart à la centrale. Dehors le soleil est déjà haut dans le ciel et
brille sans concurrence, aucun nuage d’un horizon à l’autre. Le vent est tombé,
la mer est plate, sans une ride, la
température est agréable, environ cinq degrés négatif.
Pourtant la base a changé, tout est calme très tranquille.
Les adélies se font rares sur
le haut de la base, pas un véhicule ne circule, l’hélico est parti. Un
sentiment m’envahis je suis frappé par le silence, je n’y avais jamais vraiment
fait attention.
Tout cela je le redécouvre dans la fraicheur du matin, ça y
est l’hivernage a commencé.
Depuis la veille au soir nous sommes vingt-trois, vingt-trois
hivernants isolés sur un morceau de rocher, seuls pour huit mois sans
ravitaillement possible. La base la plus proche est Casey, station australienne
à mille kilomètres à l’ouest.
Le dernier bateau appareillé à 21h30, emportant avec lui
les derniers campagnards d’été, dans la pénombre naissante nous saluons le
départ avec quelque flares, l’image est exceptionnelle, le temps est très
antarctique, le catabatique bien établi traverse les couches de vêtement, un
plafond nuageux assez bas cache la lune.
Dernier appareillage de L'Astrolabe pour la CE 18/19 crédit photo Gaëtan Heymes |
En remontant au séjour, un sentiment d’euphorie semble nous envahir, ça y est l’hivernage est
lancé, nous sommes contents, voilà presque trois mois que nous sommes arrivés ici,
plus longtemps même pour certains, et le moment que l’on attendait arrive
finalement. On traine un peu dans la nuit, profitant de ce moment.
Feu d'artifice sur DDU crédit photo Gaëtan Heymes |
Samedi pour célébrer le début de notre aventure et changer
de l’ordinaire nous faisons un barbecue au dortoir été sous le soleil
magnifique et le vent qui n’est pas réapparu. Sur la mer d’huile qui nous
sépare du continent, on observe les premiers pancakes de glace, début du
processus de formation de la banquise, le léopard de mer vient faire quelques
rides sur la surface plane de l’eau. Le moment est génial, le temps semble
suspendre son cours, les rires fusent autour de la table, Bertrand notre chef
cuisinier s’est surpassé comme d’habitude.
Le barbecue par -5°C crédit photo Gaëtan Heymes |
DDU est maintenant isolé pour les huit prochains mois,
malgré cela les premières heures de
l’hivernage sont magnifiques, et me laissent de très bon souvenirs et des
images plein la tête.